Dans le BPJEPS proposé par EDO, il existe un dispositif de formation un peu particulier que l’on appelle dans notre jargon la pédagogie appliquée. Pendant 80 heures au cours des 670 heures de formation, chaque stagiaire en formation chez EDO est accompagné d’un formateur dans des écoles ou encore des EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes). Ce dispositif s’étale tout au long de la formation de manière récurrente sur une demi-journée par semaine, en général le matin. La promotion des stagiaires est répartie en plusieurs groupes de 4 à 5 stagiaires. Chacun étant accompagné d’un formateur.
Dans cet article nous allons évoquer ensemble la séance qui a été mise en place par Mattéo, stagiaire BPJEPS depuis juin, au sein de l’école Mère Teresa à Roubaix dans le cadre de l’animation d’une séance de motricité avec des grandes sections de maternelle, un groupe entre 4 et 5 ans.
Qu’est-ce que la pédagogie appliquée concrètement ?
Pour chaque séance, on amène chaque stagiaire à devoir tout préparer en amont et la transmettre à son formateur. Il se retrouve alors directement sur le lieu du dispositif de pédagogie appliquée en l’occurrence ici sur une école. Le stagiaire met alors en place la séance sous le regard bienveillant de ses collègues qui doivent réaliser des observations sur l’évolution de la motricité du public. Le formateur lui, coordonne le travail de chacun et à l’issue de la séance organise une analyse de pratique.
Dans le cadre de la séance prévue par Mattéo voici quelques exemples de ce qu’il a essayé de mettre en place au sein de son parcours de motricité.
“J’ai voulu travailler un peu de franchissement d’obstacles en ajoutant des échasses. On a déjà fait sans par le passé. Lors des exemples pour démontrer, j’ai remarqué que les élèves n’arrivaient pas à avancer avec les échasses. J’ai préféré enlever les échasses et rester sur le parcours qui était prévu pour l’activité pour éviter les complications. Je m’adapte à leur niveau.«
« Je voulais travailler le rapprochement frontal. Il fallait qu’ils mettent un pied devant l’autre. Quand ils étaient en pas chassé, j’allais vers eux et je leur disais de se mettre bien droit, de regarder loin devant eux et je gardais ma main proche d’eux au cas où ils perdaient l’équilibre. Ils avaient toujours de cette façon un moyen de se rattraper. Il y en a un qui avait beaucoup de mal même si je laissais ma main du coup je me suis mis face à lui. Mes pieds étaient de chaque côté de la poutre. En marche arrière j’avançais. L’élève était face à moi, j’avais les mains proches de lui, il ne les tenait pas, mais il avançait dans le plan frontal. Donc il a réussi au fur et à mesure.”
Il passe ensuite sur un autre type d’atelier :
“Après il y avait des modules en mousse où ils avaient un pot avec une balle. Ils devaient la tenir avec les deux mains et monter sur ces modules sans s’aider des mains et le franchir sans s’aider également. D’où l’utilité du pot avec la balle. A la fin, ils devaient se mettre dans un cerceau et y a des objets en forme de U que j’ai mis au sol pour les inciter à bien lancer de bas en haut pour que ça atterrisse dans une caisse.”
Dans le cadre de l’analyse de pratique mise en place par le formateur, il est important pour nous de faire en sorte que l’ensemble des échanges puisse se faire de manière bienveillante avec le moins de jugement possible. Le formateur va essayer de s’appuyer sur des faits et des constats observés lors de la séance. Tout cela pour amener l’animateur de la séance ainsi que ses collègues à essayer d’avoir une réflexion pour améliorer leur pratique. Que ce soit au sein même du dispositif mais également à l’extérieur lorsqu’ils sont en situation de stage.
A l’issue de cette séance, un échange entre Aziz Bensalem, formateur BPJEPS, et Matteo, stagiaire EDO a lieu.
Dans un premier temps, le stagiaire effectue un débrief de sa séance avec le formateur en lui faisant part de son ressenti mais aussi de l’approche qu’il a tenté de mettre en place. Il explique enfin le principe de l’activité, l’objectif pédagogique et les difficultés rencontrées :
“Pour éviter qu’il y ait des erreurs dans la compréhension des consignes, je leur ai expliqué chaque atelier et il y a toujours un enfant qui est venu démontrer pour donner un exemple à suivre afin de mettre les autres en confiance. Si c’est un adulte, l’enfant peut se dire que c’est facile pour nous car on est adulte. Donc c’est pour ça je préfère toujours expliquer avant et voir s’ils ont compris en démontrant avec un de leur camarade. Mais chaque enfant a ses difficultés. Même si dans l’ensemble ils avaient presque tous compris les consignes, y a toujours quelques erreurs de compréhension de l’exercice.”
Le formateur via ses questions permet à notre stagiaires de s’améliorer pour éviter d’éventuels soucis pour les prochaines séances. Tout cela à travers des échanges poussant le stagiaire à lui même proposer des solutions :
“Pour éviter que ça ne se reproduise, j’aurais pu faire comme pour le premier exercice avec le pot et la balle. Ils étaient obligés d’attendre ce pot avant de partir. Donc peut-être donner un objet à l’élève qui passe et faire l’exercice avec un système de relais. Comme ça ils ne sont pas frustrés. Il faut que je trouve des solutions pour que l’enfant soit autonome face à son engagement sur le parcours.”
Pour clôturer cet échange, Aziz interroge Mattéo afin de savoir s’ il estime que les objectifs lors de la séance sont accomplis. Parfois c’est le cas :
“D’après moi, mon objectif de séance est atteint. Pour l’exercice où il fallait ramper, j’attendais qu’ils restent stables sur le rond. En trouvant la bonne méthode pour avancer, ils vont avancer sans tomber. Pour le lancer d’objet, j’attendais un lancer de bas en haut et que la balle atterrisse dans la cible. Et pour franchir les obstacles, l’exercice avec les steps et les haies. J’attendais qu’ils franchissent sans faire tomber la haie et de préférence sans toucher.”
Cependant, il nuance son propos, notamment sur le ramper :
“Ramper c’est partiellement atteint car beaucoup ne s’aident pas des jambes. Certains mettent les mains sur les tapis et avancent comme ça. Ils ne vont pas mettre les mains sur l’obstacle pour avancer mais sur les tapis et ils vont se soulever pour avancer.”
Grâce à son expérience en séance et les échanges avec le formateur BPJEPS, Mattéo à proposer quelques conseils pour ses futures séances :
Pour ramper : “Il faudrait qu’ils ramènent les jambes et s’aident de leurs bras”
Pour le lancer : “je donnerais comme conseil de changer d’obstacle pour qu’ils lancent bien de bas en haut. Le but étant de travailler sur les trajectoires ascendantes et descendantes”
Pour la poutre : “Pour l’équilibre, je donnerais comme conseils d’écarter les bras pour assurer une stabilité sur la poutre, regarder loin devant pour avoir un point fixe. Pour accorder les deux , il faudrait essayer via un exemple de leur montrer une posture qui leur permet de garder le contrôle sur leur équilibre et leur pieds tout en ayant une vision globale sur l’avancée sur la poutre.”
Côté formateur , Aziz observe un impact plus conséquent de ce dispositif sur les stagiaires à l’inverse d’un cours plus traditionnel :
“La pédagogie appliquée, j’en fais depuis des années. Je trouve que l’impact sur la compréhension des stagiaires est beaucoup plus important. Ce module demande une grande capacité d’adaptation, ça s’éloigne souvent très loin de ce qu’ils s’imaginaient en cours théorique.”
Mais le formateur apprend aussi par la même occasion et met en pratique certaines propositions des stagiaires :
“On apprend beaucoup de choses. Si je fais ce métier c’est pour ça. Chaque séance, chaque vision est différente. Par exemple, j’avais une séance avec une stagiaire face à un public de petite section. Le but de la séance était de capter l’attention du public. Elle est arrivée avec une marionnette qui ne pouvait pas parler fort et qui ne pouvait lui parler que dans l’oreille. Ils ont l’obligation d’être silencieux pour que la marionnette puisse donner les consignes à l’éducatrice. Et ça a marché, c’était très impressionnant. Je l’ai même testé sur mes enfants. Ce que je vis dans mon travail, j’essaye de l’amener chez moi et inversement.”
On vous apporte également le point de vue de Greg, cofondateur d’EDO SPORT ANIMATION sur la pédagogie appliquée.
“Pourquoi mettre en place de la pédagogie appliquée chez EDO ? Pour plusieurs raisons. La première c’est que ces créneaux-là jalonnent la totalité du parcours de formation des stagiaires, sur une très longue période. En faisant cela sur une longue durée de la formation. Cela permet aux stagiaires de se rendre compte des progrès qu’ils réalisent. Le premier objectif, c’est de pouvoir les amener à avoir une mise en pratique des contenus théoriques qu’ils ont pu voir dans d’autres types de cours. Ensuite, le fait qu’ils soient encadrés par des formateurs permet de faire le lien entre théorie et pratique plus facilement car les formateurs en pédagogie appliquée le sont également sur des contenus théoriques. Ils ont une bonne maîtrise des contenus abordés en formation.«
« Sur le plan pédagogique, ça nous permet de voir où nos stagiaires se situent au fil des apprentissages qu’ils effectuent. Il y a également une fonction de contrôle par rapport à ce qu’ils réalisent en alternance avec leurs tuteurs. Le tuteur ne maîtrise pas toujours la terminologie, le langage et les assises théoriques qu’il y a en formation. Il a parfois obtenu son diplôme depuis longtemps. Ça nous permet aussi de reposer un cadre afin que le stagiaire puisse voir les attendus de la formation. Tout en lui permettant de se situer par rapport à ce qu’il fait en alternance. Ça apporte également une fonction de dynamisation des pratiques.«
« En étant au contact de leurs collègues, ils discutent de pédagogie autour d’un moment vécu par tous. On les amène à développer de nouvelles idées par rapport à ce qu’ils font au quotidien dans le cadre de leur stage. La particularité c’est que l’on va chercher à mettre les stagiaires dans des situations où ils vont être contraints et amenés à prendre des risques sur des activités sportives qu’ils n’ont pas l’habitude de mettre en place avec des publics et des conditions matérielles qui sortent un peu de leur confort. Donc l’idée c’est aussi de les dynamiser vis à vis de ça”
Voilà, vous savez maintenant comment se passe une séance de pédagogie appliquée et les bienfaits qui s’en dégagent. On remercie Aziz et Mattéo et Greg pour leur participation dans cet article.
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